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Depuis quelques années, l’apiculture revient en force. Dans le contexte actuel, où la biodiversité est menacée par les activités humaines, il faut s’en féliciter. L’espoir de sauver des espèces en voie de disparition ne tient pas seulement dans les prises de décision d’un état, mais bien dans l’implication d’un nombre grandissant de citoyens. Le futur des abeilles tient en grande partie dans l’intérêt que nous lui porterons demain.
En 2018, la France comptait 56700 apiculteurs, dont la plupart (92 %) sont des amateurs qui possède quelques ruches. C’est ainsi plus de 1 million de ruches qui sont maintenues dans les jardins et dans les champs. Peut-être pouvez-vous aussi contribuer à maintenir la population d’abeilles mellifères ?
Mais avant d’aller plus loin sachez que l’apiculture n’est pas aussi facile qu’on l’imagine au premier abord. Il faudra apprendre, s’exercer et être patient avant d’obtenir de bons résultats. Nous avons donc décidé de partager avec vous des conseils bienvenus. Et cet article va présenter comment bien débuter l’apiculture chez soi.
Les obligations de l’apiculteur amateur
De part son cadre légal, la France est un pays favorable à la pratique d’une apiculture de loisir. Comme nous le verrons par la suite, il est possible pour chacun d’installer des ruches, même si vous vivez en ville. Mais il faudra respecter les points suivants. Si vous possédez entre une et dix ruches, vous devrez :
- Déclarer en ligne votre activité apicole
- Respecter des distances entre vos ruches et le voisinage
- Souscrire à une complémentaire d’assurance
Déclarez votre activité apicole en ligne
La déclaration de votre activité apicole doit se faire dès la première colonie acquise. Cette déclaration se fait en quelques minutes depuis Internet et doit être renouvelée chaque année entre le premier septembre et le 31 décembre. Vous obtiendrez directement votre NAPI, c’est-à-dire votre numéro d’apiculteur. Vous aurez à inscrire ce numéro à l’entrée de votre rucher – l’endroit où vous gardez vos ruches rassemblées – en le plaçant sur un panneau suffisamment visible. Il faudra aussi le reporter sur l’une de vos ruches. Votre rucher sera ainsi identifiable par les services de l’état.
Respectez les distances de sécurité
Les abeilles sont des insectes capables de piquer ! Si cela ne vous est jamais arrivé, pas d’inquiétude, vous en ferez rapidement l’expérience. Mais vous devez vous inquiéter particulièrement de la sécurité et de la tranquillité de vos voisins et des passants.
Les personnes qui passent à proximité d’une ruche sont rarement attaquées par les abeilles. Mais il faut toutefois imposer une distance de sécurité pour limiter les risques et pratiquer son activité sereinement. Il existe en France des normes qui doivent être respectées. Ces lois et ces arrêtés préfectoraux définissent les distances minimales à observer entre les ruches et les propriétés voisines ou bâtiments collectifs (hôpitaux, écoles, casernes, …). Ces distances peuvent varier d’un département à un autre. Pour plus de précision, votre mairie peut vous informer.
Mais si vous ne disposez pas d’un espace suffisant pour séparer vos ruches de 10 mètres ou de 20 mètres des zones passantes – c’est le cas en ville ou dans les zones pavillonnaires – le code rural prévoit une disposition salvatrice. Ainsi, aucune distance n’est imposée, si une palissade de deux mètres de hauteur sépare les ruches de votre voisinage. Cette palissade peut être un mur, une haie végétalisée ou une haie sèche.
Assurez-vous !
Comme nous venons de le rappeler, les abeilles peuvent causer des nuisances à des tierces personnes, à leurs animaux et à leurs biens. Afin de vous mettre à l’abri de fortes pénalités en cas d’accident, vous devez souscrire une assurance. Votre assureur peut vous renseigner et adapter votre contrat de responsabilité civile. Mais vous pouvez aussi vous assurer en vous abonnant à la revue “Abeille de France”. Le montant de l’assurance se fait en fonction du nombre de ruches possédées et des risques que l’on souhaite couvrir.
Pour être assuré, vous devez être immatriculé et en possession d’un NAPI (voir ci-dessus). Dans le cas contraire votre assurance risque de ne pas prendre l’indemnité à sa charge. L’apiculture clandestine ne présente aucun intérêt et peut vous placer dans une situation dangereuse en cas d’accident !
L’apiculture demande de l’implication
Par définition, l’apiculture est le fait d’exploiter des colonies d’abeilles pour en tirer une partie de leur production. On pensera en toute logique au miel. Mais il est aussi possible d’extraire de la cire, de la propolis, de la gelée royale et bien d’autres produits précieux.
L’apiculture va contraindre les abeilles à vivre dans un espace artificiel, la ruche. Mais aussi à recevoir des visites régulières de l’apiculteur. Dans ces conditions, les abeilles élevées ne sont plus autonomes que peuvent l’être les colonies sauvages. Vous devrez surveiller l’évolution de vos colonies d’abeilles et les aider si besoin à traverser les périodes de disette ou lorsqu’une maladie fait son apparition.
Durant la saison de butinage, des visites régulières doivent être prévues. Certains apiculteurs recommandent d’inspecter les rayons de la ruche chaque semaine. Vous pouvez espacer vos visites de 15 jours, mais ne quittez pas trop longtemps vos abeilles des yeux. Ainsi, si elles venaient à se sentir à l’étroit et qu’en votre absence vous n’avez pu réagir en ajouter des rayons de cire neufs, le risque d’essaimage est très important ! Certaines périodes sont plus sensibles que d’autres.
L’essaimage se traduit par le départ de l’ancienne reine, de la moitié des abeilles et d’une partie des réserves de miel. Cet essaim cherchera un nouvel abri pour fonder une nouvelle colonie. Et vous vous retrouverez de votre côté avec une colonie dépeuplée qui se sera plus en mesure de produire du miel avant une année.
L’apiculture demande de la patience
La première année d’apiculture est préparatoire. L’essaim nouvellement acquis va devoir constituer une colonie suffisamment forte. La première année, il ne sera pas possible d’extraire le miel des rayons de la jeune colonie. Elle en a besoin pour constituer une population vigoureuse et se préparer à passer son premier hiver. De votre côté, vous aurez besoin d’apprendre la technique, mais aussi de savoir manipuler avec calme et sans redouter les possibles piqûres.
C’est seulement à partir de la seconde année que la colonie pourra récolter suffisamment de nectar pour produire un surplus de miel. Vous pourrez alors prélever votre part – soyez raisonnable – à la fin du printemps ou en été. Bien souvent, une ruche d’un apiculteur amateur donne entre 10 et 20 kilogrammes de miel et parfois bien plus. Si vous avez plusieurs ruches, vous ne risquez pas de manquer de miel au petit-déjeuner ! Précisons qu’il ne vous est pas autorisé de vendre ou de donner les produits de votre ruche sans être professionnel. Pour cela, vous devez être en possession d’un numéro de Siret.
Choisissez votre conduite d’élevage
Chaque apiculteur à ses propres pratiques. C’est pour cela qu’il est compliqué d’obtenir des informations sur les forums et les groupes des réseaux sociaux. Vous recevrez à vos questions, des réponses souvent contradictoires. Il existe pour ainsi dire une apiculture pour chaque apiculteur.
La conduite de votre élevage apicole va dépendre :
- De votre région et de son climat
- De la végétation alentour et de son abondance
- De la pression plus ou moins fortes de prédateurs comme le frelon asiatique
- Du terrain ou de l’emplacement dont vous disposez
- De vos objectifs en apiculture
Si vous devez poser des questions à un apiculteur, nous vous conseillons de lui faire un petit résumé de votre situation propre. Il sera plus à même de vous renseigner et de vous conseiller.
Concernant le nombre de colonies, nous vous conseillons de débuter avec au moins deux ruches. Ce nombre idéal semble être de trois à cinq colonies. Ceci vous permettra de réaliser davantage d’observations, de comparaisons, mais aussi de rebondir en cas de perte d’une colonie.
Un bon emplacement pour installer son rucher
Les colonies demandent un emplacement suffisamment ensoleillé et à l’abri des vents froids. Un tel emplacement permet aux abeilles de réaliser des économies d’énergie. Car sachez que l’intérieur d’une ruche est maintenu à une température constante été comme hiver.
Mais attention au lieu trop chaud en été. Dans le sud de la France, il est préférable de placer vos ruches sur un endroit ombragé durant l’après-midi. L’ombrage d’arbres caducs est idéal. Car ces derniers perdent leurs feuilles en hiver.
Un autre facteur à prendre en compte est l’humidité des lieux. Il est préférable de placer les ruches sur un terrain qui ne retient pas l’humidité de façon prolongée. L’humidité favorise le développement de certaines maladies chez les abeilles. Même si les ruches sont posées sur un support de 30 à 50 centimètres de haut, l’humidité sera néfaste à la colonie et en particulier au couvain (œufs et larves des abeilles).
Enfin, les ruches doivent être placées sur un sol dont la végétation est tenue rase et dégagée sur un ou deux mètres de distance. Les abeilles auront plus de place pour décoller et atterrir, sans être gênée par de hautes herbes ou des branchages. Les ruches doivent être espacées les uns des autres d’un mètre au minimum, afin d’éviter que les ouvrières de retour de butinage ne se trompent de colonie ! Ce phénomène est nommé dérive par les apiculteurs. Un espacement plus important – de deux ou trois mètres – permet aussi de travailler plus confortablement autour de chaque ruche.
Attention, car une fois l’emplacement trouvé et vos ruches placées, il sera difficile de choisir une nouvelle configuration. Les abeilles sont des insectes qui s’orientent avec les éléments du proche paysage : forme et couleur de leur ruche, les buissons et arbres environnants, les bâtiments, … Si vous déplacez vos ruches d’une distance inférieure à 3 kilomètres, il y a de fort risque que les butineuses reviennent vers l’endroit initial. Vous perdrez alors une partie de vos abeilles, et pas des moindres puisque les butineuses sont celles qui ramènent le nectar et le pollen pour nourrir toute la colonie ! Le déplacement d’une ruche doit donc se faire soit :
- sur plus de 3 kilomètres,
- ou bien sûr d’un mètre par jour !
L’été, lorsqu’il fait très chaud, les abeilles partent à la recherche d’eau. Celle-ci sera rapportée dans la ruche pour aider à diminuer la température. Il est donc important de prévoir un abreuvoir pour vos abeilles. Une bassine contenant un flotteur afin que les abeilles puissent boire sans risque de noyade est parfait.
Enfin, rappelons que l’emploi d’insecticide dans votre jardin doit être écarté. Ces molécules de synthèse sont mortelles à de très faibles concentrations. Vous devrez adopter de nouvelles pratiques plus respectueuses des insectes.
Un matériel standardisé et fonctionnel
Il existe de nombreux modèles de ruches. Et chaque ruche est souvent typique d’une région ou d’une époque. La plupart des ruches ont été créées au 19e siècle pour répondre au besoin d’optimisation des pratiques apicoles. Car avant cette époque, tous les apiculteurs employés des ruches en paille pour garder leurs colonies. Mais la récolte du miel ne pouvait se faire sans détruire la colonie. Les ruches permettent alors de garder les abeilles d’une année sur l’autre.
En France, les principaux modèles de ruches employés par les apiculteurs amateurs sont :
- La ruche Dadant
- La ruche Voirnot
- La ruche Langstroth
- La ruche Warré
On rencontre aussi la ruche kényane qui est à la mode de nos jours. Et plus rarement la ruche alsacienne, la ruche Layens, la ruche-tronc, la ruche varoise, … Chaque ruche à des dimensions propres et parfois un fonctionnement différent. Ainsi les cadres des ruches – sur lesquels les abeilles viennent bâtir leurs rayons de cire – sont spécifiques à chaque modèle et ne peuvent pas s’adapter à un autre type. C’est la contrainte principale pour l’apiculteur. Il faut utiliser un seul et même modèle de ruche.
Nous vous recommandons de débuter avec le type de ruche employé par les apiculteurs de votre région ou par le rucher école où vous vous formez. Ainsi, en cas de problème, vous n’aurez pas de difficulté à obtenir un conseil, de l’assistance ou une pièce neuve. La ruche Dadant est un bon choix pour la France. Mais si vous êtes dans le midi de la France, la ruche Langstroth peut être adoptée.
De plus, lorsque vous aurez à acquérir un essaim, il y a de forte chance qu’il soit vendu sur cadres Dadant ou Langstroth. Avec la pratique, il sera possible de vous orienter en partie ou totalement vers un autre modèle. Mais ne vous imposez pas trop de contraintes pour vos débuts en apiculture.
Des souches d’abeilles rustiques
Il existe sur ce sujet un certain clivage parmi les apiculteurs. En France, la plupart des professionnels travaillent avec des sous-espèces “exotiques” ou des races sélectionnées comme l’abeille “Frère Adam”. Les raisons de ces choix sont orientées vers une meilleure rentabilité des ruchers. Les apiculteurs recherchent des comportements prévisibles et homogènes sur toutes les ruches qu’ils ont à exploiter. Ils recherchent aussi des récoltes abondantes, car n’oublions pas que les exploitations agricoles pour subsister doivent être rentables.
Toutefois, les apiculteurs de certaines régions ne peuvent pas importer des essaims “exotiques” et travaillent obligatoirement avec les abeilles noires locales. De telles mesures de protection sont prises sur l’Île d’Oléron et en Corse.
L’abeille noire est originaire de notre pays. On la retrouve sur une vaste zone d’Europe de l’Ouest et du Nord : depuis les Pyrénées au sud, jusqu’en Scandinavie au nord et l’Oural à l’est. Il existe bien entendu de nombreux écotypes particuliers à des régions et des climats donnés : abeille noire des Landes, abeille noire de Corse, abeille noire de Provence,…
Si vous souhaitez appréhender la diversité de l’abeille noire, consultez la page suivante qui présente la spécificité de l’abeille de Corse.
Ainsi si vous êtes intéressé par la conservation de l’abeille noire – notre abeille locale en raréfaction – vous serez peut-être tenté d’accueillir celles-ci dans votre jardin. Mais soyez prudent et achetez vos essaims chez des éleveurs renommés. Car les abeilles noires métissées avec d’autres sous-espèces sont souvent plus agressives !
Formez-vous suffisamment avant de vous lancer
À ce niveau de l’article, vous comprenez parfaitement que l’apiculture est un loisir qui demande de l’implication, de la rigueur et des connaissances.
Il n’est pas possible d’acquérir des ruches et de les abandonner dans votre jardin ou sur le toit de votre immeuble. Vous devez intervenir tout au long de l’année pour que vos abeilles soient en bonne santé. Et pour réaliser les bons gestes et effectuer les traitements appropriés une formation est indispensable.
Si vous ne connaissez pas un apiculteur prêt à vous apprendre la théorie et la pratique, vous devrez suivre une formation dans un rucher école, et approfondir vos connaissances par des lectures et en suivant une formation à distance.
Suivre une formation dans un rucher école
Les ruchers écoles sont généralement des structures associatives qui regroupent des formateurs expérimentés. Ils organisent des stages durant l’année pour initier les apiculteurs débutants, puis pour les perfectionner aux techniques d’élevage. Nous avons la chance en France, de bénéficier d’un bon réseau de ruchers écoles et il est probable que l’un d’entre eux se trouve non loin de chez vous.
Toutefois, sachez que les places pour les stagiaires sont limitées. Les cessions affichent souvent complet plusieurs mois à l’avance. Essayez de vous y inscrire le plus tôt possible.
Parfaire ses connaissances avec une formation en ligne
Internet révolutionne le monde de la formation, et même l’apiculture est concernée. Il est maintenant possible d’acquérir des connaissances en biologie des abeilles et sur les pratiques apicoles chez soi depuis son ordinateur. Les principales formations francophones sont :
- MOOC abeilles et environnement – gratuite, mais durant quelques mois dans l’année – https://www.fun-mooc.fr/
- Apiculture et monde des abeilles – formation par visioconférences en direct – https://apiculture.idlwt.com/
- Abeille & Nature – par un apiculteur formateur et éleveur d’abeilles noires – https://apiculture-formation.com/
L’apiculture est faite pour vous si …
L’élevage des abeilles est une pratique qui demande de l’engagement. Avant d’installer des ruches chez vous, vous devez faire un essai dans un rucher école et suivre une formation à distance. Vous saurez alors si l’apiculture est un loisir qui vous convient.
En effet, il faut être suffisamment disponible pour observer le comportement de ses abeilles et inspecter l’état des rayons. Il faut savoir identifier les maladies qui touchent le couvain – les œufs et larves des abeilles – et appliquer les bons traitements.
Si vous n’avez pas plusieurs heures à consacrer à vos ruches – au moins tous les quinze jours – il n’est pas prudent de vous engager dans cette démarche d’élevage.
En effet, des colonies abandonnées peuvent poser des problèmes pour vous ou vos voisins. Quelles seront les réactions de votre voisinage lorsque des essaims viendront à répétition se poser dans leur jardin ?
Mais si vous disposez du temps et des moyens pour pratiquer une apiculture rigoureuse, vous avez la certitude de passer de bons moments à découvrir le monde des abeilles. Moments que vous pouvez partager en famille ou avec vos amis.
Alors serez-vous bientôt apiculteur ? Quel que soit votre choix, nous vous remercions pour votre lecture. Et nous vous souhaitons une bonne continuation !